« Les instigateurs, rien que des Juifs ! », « Toujours le même objectif : l’Allemagne doit être exterminée ! ». Entre 1939 et 1943, ces formules ont été ressassées chaque jour aux Allemands par la presse et les innombrables journaux muraux. À la croisée du tract politique, de l’affiche et du tabloïd, ces journaux étaient placardés dans chaque recoin de tous les lieux publics : sur les marchés, aux arrêts de bus, dans les stations de métro, les salles d’attente à l’hôpital, les hôtels et restaurants, les bureaux de poste, les écoles, les kiosques…
Jeffrey Herf dissèque ainsi la construction de l’image du Juif diabolisé dans la presse et son orchestration : moins par Goebbels, ministre de la Propagande, que par Dietrich, le responsable de la presse du Reich, en contact quasi quotidien avec Hitler. L’auteur étudie comment la propagande quotidienne a joué un rôle capital dans la mise en œuvre de la Shoah et le déroulement de la guerre.
Quand des historiens ont étudié « l’opinion populaire », Jeffrey Herf s’intéresse, lui, à ce que le régime nazi assénait aux Allemands, à ce qui nourrissait leurs sentiments à l’égard des Juifs. Alors que l’extermination était largement engagée, cette propagande martelait que jamais les Allemands n’avaient été autant menacés d’extermination par les Juifs. C’est toute la logique paranoïaque de la légitimation du génocide qui se trouve ainsi éclairée.
Élève de George Mosse, proche de Walter Laqueur, Jeffrey Herf signe ici un ouvrage à la croisée de l’histoire des idées et du politique. L’Ennemi juif a remporté en 2006 le National Jewish Book Award (Holocaust Category).
« Ce qui deviendra le livre le plus important de notre génération sur la Shoah »
Los Angeles Times.