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Dans l'enfer de Tuol Sleng

L'inquisition Khmere rouge en mots et en tableaux

Vann Nath

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    Vann Nath est un des sept rescapés de Tuol Sleng, ce lycée français de Phnom Penh transformé en centre de torture par les Khmers rouges après leur prise de pouvoir en 1975. Rebaptisé « S-21 » et dirigé par le redoutable « Douch », Tuol Sleng symbolise à lui seul la monstruosité d’un régime pervers et paranoïaque qui arrêtait ses citoyens sur dénonciation et les torturait pour leur faire avouer des actes de sabotage imaginaires et livrer des « complices ». Ceux-ci, une fois arrêtés à leur tour, subissaient le même sort en une monstrueuse réaction en chaîne qui se solda par l’assassinat d’un tiers de la population cambodgienne. 
   Vann Nath était peintre d’enseignes, et c’est ce qui lui sauva la vie : pendant dix-huit mois de sursis, au jour le jour, il peignit des portraits en pied de Pol Pot – « Frère n° 1 » – pour les besoins de la propagande, tandis que ses compagnons d’infortune étaient réduits les uns après les autres à l’état de grabataires par de jeunes tortionnaires au sadisme inouï avant d’être achevés à coups de pioche dans les fameux « champs de la mort ». 
   Le peintre qu’il était ne perdit pas une miette de cet atroce spectacle. Après être sorti de cet enfer à la chute du régime khmer rouge en 1979, il se consacra à faire connaître le calvaire des quatorze mille martyrs de Tuol Sleng en peignant de mémoire les scènes dont il avait été le témoin, et en racontant son histoire. 
   Bien que Vann Nath ne soit ni écrivain ni artiste au sens où on l’entend généralement, son témoignage en mots et en images est à ranger parmi les œuvres majeures de la mémoire concentrationnaire aux côtés de celles de Primo Levi et de Varlam Chalamov. 
   Au moment où s’ouvre enfin le procès des dirigeants khmers rouges survivants, dont le fameux Douch, Dans l’enfer de Tuol Sleng jette une lumière crue sur la barbarie d’un système dont les responsables affirment aujourd’hui, suivant un scénario devenu familier, qu’ils « ne savaient rien » ou qu’ils « obéissaient aux ordres ».